par Thierry Zalic critique gastro-nez-mique. |
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starring: Parfums, Chanel, Lancôme, Saint Laurent, Gaultier, Dior, Restaurants, Bardet, Troisgros, Boyer, Gagnaire, Bardet, Blanc, Abraham, Chavent, Veyrat. Quand DELUXE, revue superficielle, connaissant ma rigueur de critique gastronomique, ma proposé de goûter des parfums, les composer en cocktails, puis les associer à des restaurants, jai refusé. Pourtant mes deux passions se joignaient là, celle des parfums qui restent quand les femmes me quittent et de la grande cuisine car la mienne est petite. Trop farfelu pour moi, ai-je tout de même répondu à Beigbeder, je suis lhomme quil ne vous faut pas. Mais il a compris linverse. Ne jamais décevoir lhomme est une de mes devises. Les femmes, je les déçois sans le faire exprès. Ainsi acceptai-je malgré moi, me promettant tout de même de ne pas déroger aux valeurs fondamentales du critique, perfection, rigueur et retenue, mais la vie, espiègle, a quelquefois fait sauter le bouchon et sortir ses génies. |
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![]() Poison orange. |
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En mettre un peu sur le bout de la langue, cest fort ça pique, on ne doit pas. Le sentir oui, on prend le verre, on lève le verre, on tourne le verre, je commence le test quand une sonne à la porte, une femme oui, pas une casserole. Une emmerdeuse. Moi, poli, jouvre la porte, elle dit coucou je flaire lellipse, leuphémisme car elle ma déjà fait cocu, elle ôte sa capeline et ne porte rien dessous. Si, je porte Poison, dit-elle. Ça cest fort! Je dédaigne le verre et viens la humer, cest plus vivant en lui demandant tu permets que je travaille? Je respire son ventre parfumé, ça sent les épicés coriandre poivre et cannelle de Ceylan, jagite la tête en cheval fou, le corps de Poison matteint, ambré, opoponax et ciste labdanum, jy glisse la langue, il faut goûter, miel doranger et baie sauvage. - Où ranges-tu le champagne, demande-t-elle? Où je range, où jorange, cest ça, illico je crée Poison Orange, et à parler de champagne, je lentraîne sur-le-champ à Reims, chez Boyer, juste après quelle meut dit que je ne la séduirais plus. Aucun Poison ne résisterait à Boyer. Comment ne pas céder dans ce magnifique château qui appartient à la famille Pommery. Linconsciente! A Poison, Poison et demi. Pour mieux me vaincre, elle revêtit un fourreau de Dior et me sourit, Poison, je rétorquai par une simple escalope de foie gras chaud mitonnée de sarrasin, elle caressa mon bras, Poison, je répliquai par les deux grenadins de veau au lait, elle esquissa un je taime, Poison, et je répondis par une framboise sous une crème soufflée au citron vert accompagnée de quelques zestes confits et dune glace au gingembre (98 F). Cétait peu cher pour la voir à genoux. Elle alla voir Boyer, Poison, lui dit que cétait parfait, Poison, mais plus poison quelle il lui dit que la perfection nétait pas de ce monde, si peut-être dans une de ses chambres et il lenvoya se coucher et me dit de la rejoindre pour goûter encore, avant que nos yeux se ferment, son nougat glacé moelleux ainsi que son coulis dabricot au miel. Poison. Je suis mort de Boyer et non pas de la femme. |
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Pour Égoïste, je suis tout seul, repos, repos, je prends le verre, je verse dans le verre, je renifle. Mandarine bois de rose en tête, technique du cheval fou de nouveau et je perçois plus lointain bois de santal et vanille. Pas de femme pas de femme, pour Égoïste il faut être fort, Égoïste cest on the Rocks. Au XIX ème siècle, légoïsme était décrit comme amour exclusif de soi, concentration vicieuse et rapport exagéré de tout en soi, culte sacrilège de la personnalité humaine que la religion et la morale réprouvent. Le lieu le plus abouti de ce vice extrême est La Tour Rose, à Lyon. Vicieuse la cuisine de Philippe Chavent, ufs pochés aux oursins, grouse rôtie aux figues et pâtisseries denfer comme il se doit. Vicieuses ses douze chambres, toutes exceptionnelles, différentes, égoïstes, décorées chacune par des soyeux lyonnais, chambre Brochier, voilages drapés, sol de tommettes anciennes et plafond lambrissé, vicieux que cet amour du détail quand ailleurs certains meurent de faim (pas là), vicieuse encore la chambre Guillaud tendue et drapée de taffetas de soie écossais chatoyant et plissé, vicieuse toujours la chambre Bianchini-Ferrier dominée par des créations de Dufy. Vicieux tous ces tableaux contemporains originaux, ces murs peints comme des toiles, les deux sièges Gaudi dans la chambre Pirat. Vice ultime que lÉgoïsme de Philippe Chavent qui poussa lamour de la perfection jusquà coucher dans chacune de ses chambres pour être certain que même le passant le plus vicieux ny trouverait rien à redire, même en pénétrant dans la vicieuse salle de bain aux murs incrustés de cocons de vers à soie. Vers à Soi, bien sûr. Allez, je lève mon verre à Soi! |
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On prend le verre, on lève le verre, on tourne le verre, en mettre un peu sur le bout de la langue, cest fort ça pique, on ne doit pas. Rigueur, rigueur, la tête me turlutourne, mais aller jusquau bout de lhallali droite, oui Coco, associer Coco à Cola ça va de soi, Coco, mon chouchou, une des plus belles réussites des parfums contemporains. Coco, jen renifle le tutu, résurgences danciens parfums de Chanel, Sycomore et Cuir de Russie, jy replonge le pif oh oui, bourgeon de girofle des îles Moluques, cascarille des Caraïbes pour le cur, y plonger encore la langue pour quérir le mimosa-pêche-frangipanier. Coco-Cola, jouvencelle chic, cest Pierre Gagnaire à Saint Étienne, ce Merlin lenchanteur sur fond de Vanessa Paradis. Quand Vanessa aspergée de Coco sifflote après son Cola, Gagnaire nous la fait chaud-froid danguille de lîle dYeu, puis marinade de chou-fleur, concombres et amourettes en amertume. Il jongle, Vanessa sen balance, mais tout de même craque devant la soupe soufflée au chocolat caraque et ganache tiède (non ce nest pas toi Vanessa). Vanessa, de ses belles lèvres, finit son Coco-Cola et me dit oui. Cest là que je réalise que chez Pierre Gagnaire il ny a pas de chambre! Mince! Tout avait été parfait jusque-là. |
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![]() Gaultier Limonade |
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On prend le verre, on lève le verre, on tourne le verre. Gaultier, parfum le plus design du moment, dans un container en aluminium boite de conserve, pour conserver quoi, une femme, et oui, un flacon en forme de femme vêtue dune gaine porte-jarretelles, à la fois fiole anthropomorphe des tombeaux égyptiens et mièvreries sucrée made in Saxe! Je lui hume laisselle, mévanouis presque, il me faut des sels, oui louverture fleur doranger, je hennis une fois, aussi essence de rose, blatère en chameau cur orchidée et iris, puis fond ambre et vanille douce. On se relaxe, un deux trois, cocktail Gaultier Limonade ce ne peut être que ça. Ce classicisme de la femme dans la modernité du container, cest tout Troisgros à Roanne, qui mêle le meilleur de la cuisine classique dans un décor ultra contemporain. Cuisine classique? Que diable! Est-ce classique que mêler un rouget à une cucurbitacée, la sole au cèleri-boule, lhuître au raifort ou réveiller le crabe dormeur à la julienne? Troisgros, cest Gaultier habillant Yvette Horner. A légal de Gaultier, Troisgros peut devenir la Madona des fourneaux et, avec ses deux fils, lun barbu et lautre non, créer un ballet féerique! Trois gros à Roanne est un des lieux où lon se sent le mieux en France, pas dennui, aucun personnel réfrigérant. Troisgros, cest la jeunesse éternelle, cest Gaultier Limonade! |
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Sous la langue, cest doux et ça pique, je sens la rose blanche, elle me suffit, le reste est fleurs fraîches et peau de pêche et dabricot. Trésor Tonic, voilà! Ce cocktail ne saurait aller mieux quà un des deux restaurateurs qui ma le plus impressionné, Marc Veyrat, à son Auberge de lEridan, à Annecy. Trésor pour son cur, et Tonic pour sa carapace. Révolté dehors, renvoyé de toutes les écoles, construisant son premier chalet de Manigod de ses mains nues, contre tout le monde, et dedans, linfinie tendresse, linfinie justesse de ses plats, ses ravioles aux senteurs des alpages, son consommé de Saint Jacques au Tabac dAchillée, ses trouvailles mystérieuses dAlkékenge, de chénopode ou de fnü, ses violettes sauvages, son miel de sapin, ses gentianes jaunes et bleues, une pour le millefeuille de ris de veau et le second dans une glace. Trésor Tonic que sa démarche rude, que le rudoiement de ce fort en gueule qui se lève à laurore, pour cueillir entre deux doigts, un Genépi des Alpes encore plein de sa rosée. Sil est un homme à qui lon a envie de dire je taime, sans esbroufe, cest Marc Veyrat. Trésor Tonic, cest sans doute ce que doit lui dire sa femme, le soir. Mais ne nous laissons pas hâler, fond de teint, fond de teint... |
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Je tangue comme je jazz, je fizz lâne pour avoir du son, lair cacochine du nord en sniffant, la menthe et le basilic du Jazz cest tout le jardin des Bardet à Tours, je zieute le mode demploi des Saint Laurent qui me souffle bois de Santal de Mysore, Mysore Mysore oui, une sensualité vraie, personnelle et chaleureuse ils disent, voui cest tout Sophie Bardet, lépouse toi de là que je my mette de Jean et lon sassoit à côté delle, content, car leur Rolls est venue nous quérir à la gare. Jazz, parfum dannées folles, légèreté qui swingue, décontraction du luxe, le mode demploi narre encore la modernité de lesprit, lélégance des formes et des matières oui oui, chez Sophie et Jean Bardet on peut avoir le nud pap qui flanche sans quils ne sen émeuvent. Déjà le sixième cocktail, jazz fizz dans leur petit château Napoléon III, cest formidable, boum des papilles, petits crustacés épicés de gingembre frais et de citron vert, amitiés festives pendant que le maître dhôtel incise avec un érotisme délicat un uf de pintade sur champignons de couche, élargissant la fente du blanc, laissant se répandre le jaune et laspergeant délicatement de sel de Guérande, sublime! Le sommelier ne me lâche pas, heureusement sinon je tombe, ma déjà fait goûter cinq vins, je lui propose mon jazz fizz, au bar des Bardet on jizz fazz, on dîne faste, on squize topaze, lébriété légère fait tanguer le ponton heureusement Alka-Seltzer dans toutes les chambres, et pour finir, le lendemain midi, aller dans Tours intra-muros rejoindre leur fille Valérie, dont je suis amoureux des yeux bleus cest dit cest dit. Peut-être un jour Valérie intra-muros... Mais je suis saoul, pas sous elle. |
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![]() Champagne frappé |
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Eu ens eu erre, eu ève eu erre, eu ois eu erre, a en eu am agne... pof je me cogne Champagne frappé oui, am agne, une vision légère et gaie du monde, rigueur, rigueur, je suis au point critique de la critique, am agne fruité floral chypré, je lai chypré dans le sac dune belle pendant que les bieilles de ma oi ture nous mènent chez Georges Blanc, à Vonnas. Champagne, je dégrise au volant, à côté aussi la souris dégrise, de me voir conduire elle sourit verte, jaune, son accroche est Nectarine Anis et Menthe froissée, son cur palpite de plus en plus fort rose Otto cest le cas de le dire, Blue Rose et Lychee tant elle est effrayée que du parfum il ne reste que le souvenir Mousse de chêne Patchouli Vétiver fusse-t-on en automne. Si un policier marrêtait, il me prendrait en fragrance délit, cest sûr! Blanc à Vonnas, Mecque du nec plus ultra, Champagne pour tous et frappé! demande-je au maître des lieux qui lui-même produit un merveilleux domaine dAzenay, un vrai blanc de Blanc, et que je tenfile un rouget aux huîtres, des haricots blancs à la truffe pendant quavec la belle on forme sur bouquet dherbes un duo de homard et pigeon, quelle joue la Soupe Sauvage Glacée pendant que je fais le Sot-ly-laisse avant de la Sauté de Homard sur lit de Caviar dAubergines oui. Champagne frappé oui, allez on récidive car le champagne frappe toujours deux fois, il faut finir en botté, fouetté à Saint Malo chez le divin Robert Abraham, au Franklin, dans un endroit où malgré les embruns la note nest pas salée, chez ce brun surdoué encore méconnu mais pourtant exquis, qui fait lui-même de l'huile à partir de fleurs d'Achillé, va dénicher une poire séchuan ou trouve des tétragones pour accompagner un saumon rôti sur une macération de coriandre. Exquis, dis-je encore avant de meffondrer, le nez et lestomac pleins, mais quand tu nes pas là mon amour, tout est vide, et le reste nest là que pour oublier. |
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La rigueur, la rigueur, avais-je promis. Vomir bien au milieu de la porcelaine blanche. Vomir heureux. La rigueur, et avant de meffondrer, ce dernier conseil pour la nouvelle année mondaine qui commence, mettre le parfum choisi sous une serviette, à la table du restaurant assorti, et sourire avec rigueur à la femme qui est là. La rigueur, tel est mon credo, assortie à une classe naturelle sur laquelle on ne discourra pas. Ne pas faire comme moi, qui toute ma vie avait parlé délégance, jusquau jour où elle et Gance sont partis. Jen avais trop parlé.
Poison orange: Parfum Poison de Dior Restaurant Les Crayères (Gérard Boyer) à Reims: 03 26 82 80 80 Coco-Cola: Parfum Coco de Chanel, Restaurant Pierre Gagnaire à Saint Etienne, aujourd'hui à Paris 01 44 35 18 25 Egoïste on the Rocks: Parfum Egoîste de Chanel Restaurant La Tour Rose (Philippe Chavent) à Lyon: 04 78 37 25 90 Gaultier Limonade: Parfum Gaultier de Jean Paul Gaultier Restaurant Troisgros à Roanne: 04 77 71 66 97 Trésor Tonic: Parfum Trésor de Lancôme Restaurant LAuberge de lEridan, Marc Veyrat, à Annecy: 04 50 60 24 00 Jazz Fizz: Parfum Jazz de Saint Laurent Restaurant à Tours Jean Bardet: 02 47 41 41 11 Champagne frappé: Parfum Champagne de Saint Laurent Restaurants Georges Blanc à Vonnas: 74 50 00 10, et Le Franklin (Robert Abraham) à Saint Malo |
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