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Cher Lecteur,
Le premier pari dun livre est darriver à son terme, le second de le vendre, le troisième de le faire aimer, de transformer le lecteur en ami, de ne pas trahir sa confiance.
Lire est un voyage. Comme dans tous les voyages, on a le choix entre laisser le Soi sur le quai et accepter lautre et les nouveaux paysages, ou ne pas se quitter et ne voir partout que Soi.
Ainsi j'avais envie de faire partager mon coup de cur pour les deux romans de Thierry Zalic, deux opposés. SLIP est solaire, et Poltron dAmour lunaire. Lun veut incarner le Tout, et lautre le Rien. Un héros est créatif à outrance, et lautre essuie des verres. Un des deux vaut-il mieux que lautre? Qui peut juger?
Ces deux livres, tout comme ma propre Marilyn (Moi, Je, Marilyn Monroe), sont écrits à partir des états mentaux des personnages. Le Mathias de Poltron refuse lamour car il devrait le prendre à contrario, en homosexuel, et le Thierry de Slip n'est pas tout à fait lauteur dans le sens de Rimbaud pour qui Je est un autre.
Il ne faut pas juger les personnages. Ils sont toujours exagérés, même quand l'auteur les fait ténus car là encore, ils sont un peu trop ténus. L'homme de Slip sengage dans une double histoire de passion, pour une femme et pour la littérature. Il entre dans un acte jusquau-boutiste damour dans le même sens quil existe des actes criminels.
L'obsédé sexuel devient obsédé textuel, la mégalomanie laisse place à un effacement du sujet dans lequel passent tous les autres auteurs, Joyce, Barthes, Aragon, Céline, Arthaud, Miller, Dante, Queneau... le cynique vire à lhumaniste, la poésie à la psychose.
C'est mon amour de Slip qui m'a amené à être publié chez TZP. La typographie de ce roman est sa peau, les états dâme influencent le corps du texte écrit en deux langues, féminine et masculine, parfois sur deux colonnes. Il faut entièrement lire une colonne jusquà sa fin, sur plusieurs pages, puis retourner au début de la seconde pour lire celle-ci avec, en regard, le premier texte. Parler, est-ce cela? Parle-t-on avec quelquun, ou à côté?

Des bilans financiers, des articles de journaux ou des gros titres surajoutés indiquent un réel extérieur aux deux discours des personnages, une perspective, une troisième dimension. Si Poltron dAmour est écrit dans une seule direction, le texte de Slip, rythmé au maximum au point que le héros ne peut entendre lécho de ses actes, est toujours écrit en trois dimensions, moi, les autres, et la fusion du moi dans les autres.
Dans cette spatialisation, on atteint des trous noirs où, daprès les astrophysiciens, lénergie est si intense quelle incurve lespace et le temps. Ces trous noirs sont représentés par les mots trop gonflés de sens, ce cancer des mots du héros, cette sur-poésie qui finira par lui ravir la vie.
En écrivant Slip, l'auteur m'a avoué avoir eu une incroyable prétention, que tout lecteur puisse en lire même les parties les plus déstructurées quelque soit son éducation. Il se demandait constamment jusquoù il pouvait lamener sans quil décroche, au bout de quel vertige, dans quelle spirale.

Parmi les premiers voyageurs dans cette prose, il a constaté que ceux qui sont entrés sont devenus des fans, des groupies... des amis. Dautres n'ont pas pu y parvenir mais l'auteur est sûr qu'ils y arriveront un jour, sils le veulent, sils y reviennent. Il a cette certitude butée.
Lecteur, merci de ta confiance. Sache que TZP ne vend pas des romans mais quen les donnant à celui qui les achète, éditeur et lecteur se font chacun un cadeau.
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